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Famille
Rechtszaid

Chana Paulette Maurice-RESCHAID

Anna et ses enfants

Paulette et Maurice devant

la maison des tilleuls. 1942

(Source : Anne Krauss)

Matys Rechtszajd

Matys Rechtszajd 

(Source : NC)

La mère de Jean-Pierre FOUCAULT s’appelle Paula LESKA.

Née Pessa LESKA le 27 février 1916 à Mogelnica, en Pologne, elle fuit son pays natal en direction de la Belgique dès 1938. La vie est devenue impossible et trop risquée pour une jeune femme juive.  

Elle suit ainsi le chemin d’exil tracé par sa sœur Anna, partie quelques années plus tôt à Anvers et qui vit là-bas avec Matys RECHTSZAID, son mari, avec qui elle a eu deux enfants, Paulette et Maurice. Quand Paula rejoint sa soeur à Anvers, Paulette a alors cinq ans et Maurice un an.


Paula LESKA est la troisième d'une grande famille juive traditionnelle de neuf enfants. Ses parents, restés en Pologne, tiennent une boulangerie-pâtisserie.

 

Dès son arrivée à Anvers, Paula se met au travail pour aider le couple, à la fois au magasin de produits frais que tiennent Anna et Matys, ainsi que pour élever les deux enfants qui sont encore si jeunes.

Mais les nouvelles ne sont pas bonnes, la guerre est déclarée et la Belgique aussitôt envahie.

Paula décide très vite de prendre la route de l'exil, seule, à pied. 

Elle envisage de rejoindre l'Argentine en prenant le bateau depuis Marseille. Grâce à Monsieur FALEK, le seul contact qu’elle ait à Marseille, elle rencontre Marcel FOUCAULT. Cet homme, qui a son entreprise, devrait pouvoir lui proposer un travail, et peut-être même l’aider à trouver un logement.


Quant à Anna et Matys RECHTSZAID, ils prennent eux aussi le chemin de la France et s’installent à Lyon avec leur famille, au 31 rue Malesherbes, dans le 6ème arrondissement. Afin de se mettre en règle avec les nouvelles lois françaises, ils se font connaître auprès de la Préfecture. Mais quelques jours plus tard, ils reçoivent un ordre d’assignation à résidence. Nous sommes le 1er mars 1942.

Lyon est surchargée de migrants ayant fui l’avancée allemande, et la Préfecture a pour tâche de trouver rapidement des solutions à cette situation en déplaçant un maximum de familles dans des villes et villages moins peuplés de la région. Leur lieu d’assignation à résidence sera donc en Savoie, à Aiguebelette-le-Lac. A leur arrivée, Paulette, l’aînée, est inscrite à l’école du village.

La famille est installée dans la maison des tilleuls, une coquette petite maison, en bas du village non loin du lac et destinée à la location saisonnière. Son propriétaire, Monsieur RANDON, un industriel stéphanois, gère ce bien qu’il a acheté quelques années auparavant. 

C’est dans la nuit du 25 au 26 août 1942 que les gendarmes de Pont-de-Beauvoisin prennent la direction d’Aiguebelette-le-lac. Ils traversent le village pour descendre aux tilleuls avec la ferme intention d’appliquer les ordres reçus directement du préfet, quelques heures plus tôt. Tous les Juifs inscrits sur la liste (21 noms) doivent être arrêtés, sur celle-ci figurent Anna et Matys. 

Tandis qu’Anna se plie aux ordres et sort de la maison avec les enfants encore somnolents, le mari parvient à s’échapper par la fenêtre arrière de la maison. Il est persuadé que c’est lui seul la cible.

 

Au sommet du village, l’autocar dans lequel a pris place Anna et les enfants, s’arrête devant l’hôtel Beauséjour. Plusieurs personnes sont appelées par les gendarmes et doivent rejoindre à leur tour l’autocar, regards incrédules et bagages au bout des bras.

Anna RECHTSZAID vient de reposer la question au gendarme en faction qui avait fait l’appel quelques minutes plus tôt, plus bas dans le village. « Vous êtes sûrs ? » Oui, c’est certain les deux enfants ne font pas partie de la liste des personnes qui doivent être emmenées.

 

En moins d’une minute, alors que l’autocar stationne toujours devant l’hôtel, moteur et feux allumés, Anna décide de confier ses enfants à la propriétaire de l’hôtel.  Anna explique la situation aux enfants, leur redonne leur petite valise, et promet de venir les chercher très vite. Elle ne reviendra jamais.

Il fait nuit noire et les lumières des maisons d’Aiguebelette ont déjà disparu dans les arbres, mais Matys RECHTSZAID connaît bien cette route qui monte sur Lépin puis Attignat, il l’a parcourue si souvent ces derniers mois pour aller travailler à la ferme en échange de nourriture. La ferme des BOVAGNET, à cinq kilomètres de là, est sa seule chance d’échapper en pleine nuit aux gendarmes qui sont sûrement déjà à ses trousses. 


Quelques jours après s’être sauvé et avoir été recueilli par le couple BOVAGNET, Matys rejoint la Résistance. Il a eu beau questionner tous les maquisards qui ont eu écho de la rafle, il ne sait toujours pas où ont été emmenés sa femme et ses enfants.

Il ignore qu’à l’hôtel Beauséjour Paulette et Maurice ont été pris en charge par Louise PATAT qui fait de son mieux pour tenter d’estomper le chagrin immense des deux enfants.

L’hôtelière s’inquiète de leur sort jusqu’au moment où elle se souvient d’avoir loué une chambre, il y a plusieurs mois, à une personne de la famille. Il s’agissait de la tante des deux petits qui venait rendre visite à sa sœur. Elle se rappelle lui avoir indiqué le chemin de la maison des tilleuls. En remontant les dates et les noms du grand registre de l’hôtel, Louise Patat s’arrête sur un nom, Anna LESKA. C’est bien elle! Par chance le nom est suivi d’une adresse. Elle n’a plus qu’à envoyer une lettre et espérer recevoir une réponse.

La réponse inespérée finira par arriver à l‘hôtel Beauséjour. Un certain Marcel FOUCAULT lui indique le jour et l’heure auxquels les deux enfants devront monter dans le train à Aiguebelette-Le-Lac puis dans celui de Lyon Perrache à destination de Marseille, où ils seront récupérés directement sur le quai. Quelques jours plus tard les enfants, âgés de 5 et 9 ans, retrouvent ainsi leur tante Paula

 

Marcel FOUCAULT est un Poitevin installé à Marseille et spécialisé dans l'import-export de fruits et légumes.

Dès 1941 il a rejoint la Résistance au sein du réseau "Combat", la plus importante organisation de la zone sud. Il y tient le rôle de "boîte aux lettres" dans les services de liaison. Il s’occupe aussi des dépôts d’armes et de la fabrication de faux documents. 
Avec d’autres, il fait passer la frontière à de nombreux juifs et cherche des lieux d’hébergement aux victimes des mesures discriminatoires du gouvernement de Vichy.

Lorsque Paula LESKA est arrivée à Marseille, il lui a fourni de faux papiers d’identité. Il a pris soin d’elle, l’a approvisionnée, lui a trouvé des endroits où rester et a payé pour elle les locations et l’entretien.

Lorsque les rafles commencent dans la région de Marseille, il décide de cacher Paula chez une dame de la Rose, Madame GARNIER. 

Lorsque les enfants arrivent à leur tour à Marseille, Il les amène temporairement dans une cachette chez une famille française, dans l’attente de trouver un arrangement permanent pour eux. 

Marcel FOUCAULT fournit également de faux-papiers à sa secrétaire juive. Malheureusement, elle est arrêtée et forcée de dénoncer celui qui lui avait fourni sa carte d'identité. C’est ainsi qu’il restera quinze jours dans les mains de la Gestapo et en ressortira encore plus convaincu de s'opposer à l'occupant nazi.

Il continue à s’occuper de Paula, son amoureuse et sa protégée, jusqu’à la fin de la guerre, tandis que Matys RECHTSZAID et les enfants parviennent à rejoindre la Suisse.

 

Quant à Anna, son départ du village en autocar la conduit à Vénissieux, Drancy, puis Auschwitz. Elle sera déportée par le convoi n°27 le 2 septembre 1942.

Dans ce même convoi n°27, où ont été entassés 1000 déportés (dont 144 enfants), se trouvent 39 personnes qui avaient été arrêtées le même jour en Savoie, dont 10 qui résidaient aux abords du lac d’Aiguebelette.


Après la guerre, Marcel FOUCAULT épouse sa protégée, Paula LESKA. Ils auront trois enfants : Jean-Pierre, qui né le 23 novembre 1947 à Marseille, et qui deviendra un célèbre animateur de radio et de télévision, Anne-Marie, et Françoise.

A l’invitation de l’Association Mémoire Août 1942, Françoise et Jean-Pierre sont venus à Aiguebelette-le-lac le 5 Août 2020. Ils ont découvert pour la première fois les lieux où se sont déroulés ces terribles événements. Ils nous ont livré un témoignage marqué par la simplicité et l’émotion.

Lors de la commémoration des 80 de la rafle du 26 Août 1942 Paulette nous a transmis un message vidéo depuis Boston où elle vit pour témoigner de son affection particulière pour les habitants d’Aiguebelette qui lui sont venus en aide et l’ont sauvée.

Durant cette année 2022 les élèves de la classe CM1/CM2 de l’école de Dullin-Ayn ont pu échanger par mail avec Paulette qui vit à Boston, et ont réalisé un superbe livret intitulé “Le journal de Paulette”.

Journal-de-Paulette
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