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Témoignage de

Anne-Marie Guicherd

Lieu : Grenoble

Date : 2019

Durée 49 mn

Source : Frédéric Pélisson

Pour la première fois Annie Guicherd, 93 ans, a accepté de témoigner en parlant de sa vie en 1942-1945 et des évènements difficiles dont elle a été témoin à l’hôtel Beauséjour, dans la pension de famille tenue alors par sa grand-mère.

Cet enregistrement a été réalisé chez elle, dans son appartement de la rue des Marronniers à Grenoble. Durant toute une après-midi Annie Guicherd a livré ses souvenirs devant l’oreille attentive de quatre membres de l’Association Mémoire Août 1942. 

Annie avait déjà livré un tout premier témoignage écrit en 2007 sous la forme d’une lettre, qui fait aussi partie des documents disponibles sur le site.

Grâce à cette prise de parole nous découvrons combien la vie était risquée à Beauséjour à partir de 1943. L’hôtel était alors occupé par des juifs assignés à résidence sur ordre de la Préfecture régionale de Lyon, mais il voyait aussi passer des personnes en fuite, ainsi que des maquisards dont le refuge était tout proche, dans la montagne abrupte qui domine le charmant village d’Aiguebelette-le-lac. De par cette position, il subissait les descentes régulières de la gestapo.

Avec le livre de Albert Szyfman, et celui de Gabriel Garran, ce document audio est un des rares témoignages sur la vie à Aiguebelette-le-lac en 1942-1945.

anne-marie Guicherd

Extrait d’un entretien oral :  

 

"Pendant la deuxième rafle, j’étais malade, et ils ont fait toutes les chambres… Alors là c’était les allemands, les militaires… Oui… Ils étaient armés, et … moi j’étais malade. J’étais couchée, et ils sont rentrés dans ma chambre : découverte ! allez ! raouste et coups de cravache sur les jambes ! Et ils me tiraient avec le bras … Et mon frère était dans la monté d’escalier, et qui s’est mis à crier, à hurler : maman vite ! vite ! vite ! ils emmènent Annie ! ils emmènent Annie !... Et moi je savais plus que faire ! Je voulais pas descendre du lit, je résistait tant que je pouvais ! J’avais sous mon lit ce petit de trois ans, dont la mère l’avait caché sous mon lit en lui précisant bien surtout : 

« Nouni fais attention, ne parle pas, ne dis rien, ne pleure pas, reste, ne bouge pas, surtout ne bouge pas » ! 

Et huit jours avant on avait emmené son père ! Un jeune marié quoi … La maman était toute jeune, elle est allée sous les escaliers pour se cacher, parce que mon grand-père l’avait fait fermé par un placard (…) pour descendre à la cave on avait ça sous l’escalier, il y avait une petite porte (…) Elle s’est caché là dedans. Et elle a mis le petit sous mon lit. Et elle a mis ses papiers, ses vrais papiers, derrière la plaque du lavabo… (…) Donc ils sont rentrés à deux, là, je les vois, ces deux … soldats, à hurler comme des bœufs (…) ma mère est montée tout de suite tout de suite : 

« Mais non c’est pas possible ! Fille de prisonnier ! Vous n’avez pas honte ! » Elle s’est mise à les insulter, à leur voler dessus … Y’en a un qui a sorti sa mitraillette (…) Et bien la sentinelle est partie avec elle, à la mairie à huit heure du soir, il faisait nuit noire, heureusement que les institutrices étaient secrétaires de mairie à l’époque ! Heureusement ! Ça m’a sauvé la vie ! Madame Masson. Elle a fait mon certificat de naissance, pas de problème, et il a ramené ma mère au bout de sa mitraillette. Et c’est comme ça que j’ai été sauvée."

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